Cela fait plusieurs années que les livres d'Agnès Martin-Lugand m'attirent, sans que j'ai jamais osé sauter le pas. C'est sous l'influence et les conseils de Fiona du blog Pretty Books que j'ai finalement lu le premier roman de l'auteur, Les gens heureux lisent et boivent du café. Une belle découverte.


Les gens heureux lisent et boivent du café d'Agnès Martin-Lugand : du drame la naissance du beau

Un an après avoir perdu son mari et sa fille dans un accident de voiture, Diane vit toujours cloîtrée chez elle. Elle passe ses journées à pleurer et à fumer. Les efforts de ses parents et de Félix, son meilleur ami et associé, pour lui redonner goût à la vie ne font que l'enfoncer un peu plus. Pour leur échapper, elle décide de partir en Irlande, une destination qu'elle et son mari projetaient de visiter, avant le drame. Elle abandonne tout pour s'installer dans un petit village au bord de la mer. Là-bas, elle rencontre des gens charmants mais aussi Edward, un homme au caractère bien trempé qui n'hésite pas à la bousculer.

Partir pour mieux se reconstruire
J'ai lu Les gens heureux lisent et boivent du café en deux heures, par une nuit d'insomnie. Si l'intrigue n'est pas très originale, j'ai beaucoup apprécié les personnages du roman, touchants et attachants. J'avoue avoir été totalement happée par la relation complexe qui naît entre Diane et Edward, par la complicité qui l'unit à Félix, et par la fragilité de Diane, qui découvre peu à peu sa force.

Je m'attendais au départ à un roman triste, assez sombre, vus le chagrin et la douleur qui se dégagent des premières pages. Au contraire, c'est un roman lumineux, salvateur, presque thérapeutique. L'écriture fluide d'Agnès Martin-Lugand traduit à la perfection les états d'âme de Diane, la douleur de son deuil, sa détresse face aux doutes, mais aussi la joie de beaux moments partagés. Elle décrit ces émotions avec justesse, sans commettre l'erreur de tomber dans le pathos.

J'ai pris beaucoup de plaisir à lire ce livre, et j'ai même regretté qu'il ne soit pas plus long. La fin m'a notamment laissée sur une note d'inachevé. Heureusement, Agnès Martin-Lugand a écrit la suite, La vie est facile, ne t'inquiète pas, que je lirai dès sa sortie en poche (chez Pocket) le 2 juin 2016.

Les gens heureux lisent et boivent du café d'Agnès Martin-Lugand, Pocket, 2014, 186 pages

Après plusieurs mois sans avoir lu de thrillers, ce genre me manquait et j'ai été prise d'une envie irrépressible de lire. Je me suis donc tournée vers une valeur sûre, les aventures du duo Sharko/Henebelle de Franck Thilliez. Comme à l'accoutumée, j'ai passé un excellent moment.


Angor de Franck Thilliez : Sharko et Henebelle au top de la forme

Trafic macabre
Après s'être penché sur les mécanismes du cerveau dans les premiers tomes de la saga Sharko/Henebelle, Franck Thilliez s'attaque cette fois-ci à l'organe qui nous maintient en vie : le cœur. Tout commence avec la découverte d'une femme retenue prisonnière dans un souterrain. A partir de là, les deux flics vont peu à peu mettre à jour un trafic funeste dont les ramifications vont jusqu'en Argentine.

La quatrième aventure du duo Sharko/Henebelle laisse cette fois-ci davantage la place à l'intrigue qu'à la vulgarisation scientifique, sans pour autant être moins passionnant. Comme à son habitude, Franck Thilliez signe un roman au rythme haletant, impossible à lâcher.

Ce quatrième tome marque aussi l'évolution des personnages de Franck Sharko et Lucie Henebelle, désormais tous deux lieutenants au 36, quai des Orfèvres. Leur relation a fait un chemin considérable depuis les premiers volets de la série, puisqu'ils viennent de fonder une famille. Les jeunes parents ont donc enfin droit à un peu (juste un peu) de répit, et Angor offre donc la place à l'épanouissement de personnages nouveaux ou secondaires tout aussi intéressants.

J'avais mis de côté le thriller pendant les deux premiers trimestres de ma grossesse parce qu'ils me provoquaient des cauchemars assez atroces. A ma grande surprise, j'ai dévoré ce roman pourtant riche en détails sinistres sans faire le moindre mauvais rêve ! Je vais donc reprendre les thrillers avec plaisir et impatience, et j'ai déjà prévu de lire très bientôt Pandemia, la suite des aventures de Sharko/Henebelle.

Angor de Franck Thilliez, Pocket, 2015, 638 pages

A lire également :
- Le syndrome E et GATACA (Saga Sharko/Henebelle, tomes 1 et 2)
- Atomka (Saga Sharko/Henebelle, tome 3)

Après avoir adoré Mr Mercedes l'année dernière, j'attendais la suite avec impatience. Malheureusement, malgré un pitch prometteur, Carnets noirs m'a laissée sur ma faim.


Carnets noirs de Stephen King : Bill Hodges reprend du service

Lecteur assassin
Sur le papier, Carnets noirs avait pourtant tout pour me séduire : une suite à Mr Mercedes qui m'avait beaucoup plu mais surtout, surtout, une histoire de lecteur prêt à tous les crimes pour "venger" son personnage de roman préféré. C'est d'ailleurs, sur le quatrième de couverture, le parallèle avec Misery (mon roman préféré de Stephen King à ce jour) qui m'a mis l'eau à la bouche.

Malheureusement, j'ai trouvé l'intrigue très lente à démarrer. Je suis pourtant habituée maintenant des romans de Stephen King, qui commencent toujours par de longues digressions qui me plaisent en général beaucoup. Là, je me suis surprise à m'ennuyer.

Seconde déception : le personnage de Morris Bellamy, le lecteur assassin. Contrairement à Brady Hartsfield dans Mr Mercedes ou Annie Wilkes dans Misery, qui étaient de bons gros psychopathes, je l'ai trouvé assez pathétique, capable du pire, certes, mais complètement paumé. Chez Stephen King, j'aime sa capacité à inventer des personnages effrayants par leur degré de folie. Pour le coup, Morris ne m'a inspiré que de la pitié et j'ai donc été déçue.

Malgré tout, Carnets noirs reste un roman agréable, surtout vers la fin, qui annonce un troisième tome surprenant, je l'espère. On y retrouve le trio de choc Bill Hodges, Holly Gibney et Jerome Robinson que Stephen King avait inventé dans Mr Mercedes. Comme les parallèles avec l'intrigue du tome précédent sont nombreux, je vous conseille d'ailleurs vivement de lire Mr Mercedes avant Carnets noirs.

Dans ce roman, Stephen King renoue avec le thème de l'écriture, en mettant cette fois-ci le lecteur, et non l'écrivain, au centre de l'intrigue. Mais si l'histoire et les personnages ne m'ont pas totalement séduite, j'ai tout de même apprécié le bel hommage de l'auteur à la littérature comme guide et compagnon de vie.

Carnets noirs de Stephen King, Albin Michel, 2016, 426 pages

Numéro zéro s'annonçait comme un polar sur la manipulation de l'information et la nébuleuse des médias. Cette promesse semblait alléchante sur le papier, mais j'ai finalement trouvé ce roman décevant.


Numéro zéro d'Umberto Eco : délire et paranoïa à la une

Milan, 1992. M. Colonna est embauché avec six autres journalistes pour créer Domani, un nouveau quotidien dédié à la recherche de la vérité. Théories du complot, attentats : la première année de travail est consacrée à fouiller le passer pour composer les "numéros zéro" destinés à convaincre les actionnaires... et à faire trembler les grands du pays. Mais l'assassinat d'un des journalistes remet tout le projet en cause.

Paranoïa et manipulation médiatique
Pas de doute, on retrouve dans Numéro zéro le goût d'Umberto Eco pour le burlesque et les énigmes. Le roman se présente comme le journal intime de Colonna racontant les événements qui se sont déroulés avant l'assassinat de son collègue. Dès les premières pages, les faits semblent servir la paranoïa du héros, qui ne fera que s'accentuer au contact des autres personnages. Ici, ce n'est pas l'enquête ni même les circonstances de la mort du journaliste qui importent, mais bien les raisons pour lesquelles il aurait pu être supprimé, à savoir ses théories fumeuses sur l'histoire de l'Italie. Umberto Eco s'amuse à traiter les délires de ses personnages plus que réceptifs à la théorie du complot.

Malheureusement, les passages consacrés aux théories ahurissantes des différents personnages sont très longs et font référence à des événements de l'histoire italienne qu'il faut avoir étudié de près pour en comprendre toute la subtilité. L'un des personnages développe par exemple une hypothèse sur la fausse mort de Mussolini et ses conséquences sur la politique italienne contemporaine, qu'un lecteur français aura du mal à comprendre. J'ai donc passé très rapidement ces passages qui m'ont pour ainsi dire ennuyée.

Enfin, Numéro zéro est une satire du monde des médias, qui n'hésitent pas à manipuler l'information pour faire chanter untel. Le personnage de Simei, le rédacteur en chef du journal, symbolise à lui seul la malhonnêteté d'une certaine presse : "Les journaux disent aux gens ce qu'ils doivent penser", rappelle-t-il à ses journalistes. Umberto Eco tombe volontairement dans la caricature, mais il n'est parfois pas si loin de la vérité.

Finalement, c'est donc une lecture en demi-teinte. Si j'ai apprécié la démarche de l'auteur, j'ai eu du mal à me plonger dans ce roman court mais très dense, dont les trop longs passages sur l'histoire italienne ont eu raison de ma patience. 

Numéro zéro d'Umberto Eco, Le Livre de Poche, 2016 (première parution en VO : 2015), 233 pages