Dans Berezina, Sylvain Tesson l'écrivain casse-cou nous emmène dans un road-trip en side-car de Moscou à Paris, deux cents ans après la retraite de Russie. Un récit fait de neige, de gomme et de vodka sur les traces de l'Histoire.
4 000 km d'aventures sur trois roues
J'ai découvert Sylvain Tesson en 2010 avec son récit Dans les forêts de Sibérie, qui l'avait poussé à vivre six mois d'ermitage dans une cabane au bord du lac Baïkal. Un livre plein de beauté et d'intelligence que j'avais adoré. Deux ans plus tard, l'écrivain voyageur renouait avec son amour pour la Russie et entreprenait, avec quatre amis français et russes, un périple en side-car Oural (des machines soviétiques authentiques) sur l'itinéraire emprunté par la Grande Armée de Napoléon mise en défaite par les Russes. Berezina est le récit de ce voyage de ces treize jours à travers la Russie, la Biélorussie, la Lituanie, la Pologne, l'Allemagne, le Luxembourg et la France.
J'avais été totalement séduite par le calme éternel, propice à l'introspection, de Dans les forêts de Sibérie. Dans Berezina, c'est l'inverse : tout est vacarme, rugissement des machines, soirées vodka et mains dans le cambouis. Cette fois, Sylvain Tesson n'est plus seul. D'un côté, il nous décrit son voyage, pannes de side-car comprises, et se laisse aller à de belles digressions sur l'épreuve que la retraite de Russie a dû représenter pour les soldats français, et ce qui les a poussés à suivre leur chef, même dans la défaite. De l'autre, il nous rapporte ses conversations enflammées, parfois houleuses et imbibées, avec ses quatre acolytes, à grand renfort de citations de Caulaincourt, le Grand Ecuyer de Napoléon. Le récit oscille entre le calme de la route, moment de la réflexion, et le raffut des soirées arrosées. La petite équipe vit son voyage à fond les manettes dans un joyeux désordre.
J'ai particulièrement aimé la plume impertinente et pleine d'humour de Sylvain Tesson, et son talent à saisir la poésie et la portée existentielle de chaque expérience vécue. C'est ce que j'aime le plus chez cet écrivain : chaque voyage est le lieu d'une intense réflexion philosophique et existentielle qu'il partage avec son lecteur.
Même si j'ai été moins charmée que ce à quoi je m'attendais, Berezina est un récit de voyage inattendu et plein de vie : on reconnaît bien là la marque de fabrique de Sylvain Tesson.
Berezina de Sylvain Tesson, Folio, 2016, 205 pages
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